Impatience de jeune recrue (ouvert à qui voudra)

Agatha avait achevé sa formation, elle s'était même montrée brillante, mais depuis qu'elle était devenue soldat on ne lui avait confié aucune mission, à part de temps en temps participer aux tours de garde. Elle passait le plus clair de son temps à errer dans le Quartier Général en attendant qu'on veuille bien enfin faire appel à elle. Il lui tardait d'aller au combat au lieu de rester là à attendre. Ce jour-là, après avoir parcouru tous les couloirs, rôdé dans la cour et sur les remparts, elle était venue dans le salon où il y aurait peut-être quelqu'un pour lui expliquer pourquoi on la tenait à l'écart. Elle s'appuya contre la cheminée et regarda les flammes qui dévoraient les bûches.

* Pourquoi est-ce qu'on me traite encore comme une gamine ? , pensa-t-elle en donnant un violent coup de poing sur la tablette de la cheminée. Je suis meilleure combattante que bien des soldats ! Je n'ai quand même pas fait tous ces efforts pour rien, pour qu'on me tienne enfermée dans ce Quartier Général qui commence à me sortir par les yeux ! Si encore on me laissait sortir toute seule dans Londres... Mais les gardes ne me laissent jamais passer le portail si je ne suis pas accompagnée ! *

Elle était furieuse, et ne comprenait pas ce qu'elle considérait comme une injustice. Qu'on lui donne au moins la chance de prouver ce qu'elle valait dans un vrai combat ! Elle avait beau aimer profondément Sarah, elle lui en voulait...

* Je vais aller la trouver et lui dire ce que je pense ! Mais encore faudrait-il savoir où elle est... Même elle, elle semble m'éviter... Ah si seulement mon père était là ! Je suis sûre que lui au moins il m'écouterait et me donnerait ma chance... Je ne suis plus une petite fille ! D'ailleurs, il y a longtemps que je ne suis plus une petite fille. Si ils ne me font pas confiance, et bien je m'échapperai d'ici et je leur montrerai ce dont je suis capable !*

Elle sentit les larmes lui monter aux yeux. Des larmes de rage, et peut-être aussi le fait d'avoir pensé à son père. Elle était pudique sur le sujet, elle n'en parlait presque jamais... Pourtant, il lui manquait, elle avait envie de le connaître. Elle avait envie d'en savoir plus sur qui elle était, comment était cette mère qu'elle n'avait jamais connue...

[Si vous le permettez ^^"]

Le jeune Owen Solomon ne se réveilla pas en sursaut ce jour là. Aujourd'hui il avait juste transpiré à cause de la magnifique cheminée qui ornait sa chambre. Peu de temps avant qu'il comprenne son état éveillé, il regarda autour de lui pour apercevoir caché derrière des voiles foncés une lumière persistante et chaleureuse. Il soupira sa déception d'une nouvelle journée où on ne sait pas comment faire pour atteindre les buts qu'on souhaite accomplir. Le jeune Solomon appela son suivant, un jeune homme au doux prénom de Will. Le garçon de 16 ans sortit de sa petite chambre en prenant les vêtements de son maître. Depuis deux ans, Solomon avait recueillit cet adolescent qui n'avait plus de parents causés par un meurtre barbare...Pris de pitié, Owen le prit sous son aile et lui proposa de le servir en échange de sa protection sincère. Will posa les vêtements de Solomon sur son lit alors que celui ci s'étirait de dos au jeune homme par pudeur.

(Owen) : "Veux-tu te retourner Will. As-tu bien dormi ?"
(Will) : "Euh...oui Maître."

Il n'appréciait pas lorsque son jeune valet osait le regarder se dévêtir derrière la porte qui séparait leur chambre. Il lui fit plusieurs réprimandes méritées quand son œil se baladait dans le trou de la serrure. Au Diable les chemises de nuit ! C'est beaucoup trop difficile de dormir avec...Solomon essayait d'oublier cette nuit horrible où il avait bravé l'interdit en se couchant nu sous ses draps. Nous savons ce qui est arrivé par la suite. Mais cela s'est passé à l'extérieur de la forteresse, il ne devrait pas arriver de telles pratiques en son sein théoriquement. Théoriquement dit-on. Will apportait un plateau avec du thé et quelques morceaux de pain beurrés. Solomon rechigna lorsqu'il vit son petit déjeuner en enfilant sa chemise blanche brodée et sa culotte marron. Sa main déliait les quelques nœuds de ses cheveux châtains sur le coté de son épaule. Will rougissait à chaque fois qu'il voyait sa chemise ouverte sur le torse totalement imberbe. Owen remarquait cette attirance qu'il n'arrivait pas à comprendre vu le jeune âge de son valet. Solomon prit à peine une tartine soigneusement beurrée par Will tout en finissant de se vêtir.

L'air était plutôt frais ces temps ci avec un ciel plutôt gris. Son jeune valet décida de ranger avec amour toutes les choses qui ne sont pas à leur place. Solomon montra son départ en fermant la porte de sa chambre et descendit les marches avec lenteur. Il ne savait pas lui même où il devait aller. A vrai dire, il ne désirait pas encore une fois passer une journée dans sa chambre auprès d'un adolescent en mal d'hormones. Son absence allait l'empêcher de se mettre dans une rogne que le jeune adolescent pouvait mal vivre par la suite. Des personnages douteux traversaient les couloirs dans les étages, Owen ne pouvait heureusement pas connaitre toutes les personnes qui vivaient dans la forteresse. Du repos, un peu de réconfort dans un bon fauteuil avec des inconnus au pire pensa-t-il. Il pénétra dans le salon où une dame mystérieuse était appuyée sur la cheminée qui donnait une chaleureuse envie à Solomon d'y rester.

"Milady..."

*Je pense qu'il vaut mieux ne pas la déranger si elle préfère que je la laisse tranquille.*

Il fit une légère révérence en signe de respect et de salut. Vu qu'elle était avant son arrivée appuyée sur la cheminée dans ses pensées, Owen ne préféra pas attendre qu'elle lui donne sa main pour la baiser. Il s'assit sur le canapé confortable et profita de la chaleur évacuée de la cheminée.

]Je le permets, Sir, je le permets ; enfin âme qui vive dans cette forteresse, je commençais à désespérer ]

Agatha fut surprise de l'arrivée de l'inconnu. Surprise et quelque peu gênée, car sa fierté naturelle lui interdisait de montrer ses larmes à toute autre personne que Sarah. Elle sentit qu'il lui prenait la main pour la baiser ; au moins avait-il de bonnes manières. Même si c'étaient là des usages qui n'avaient pas cours chez les guerriers avec lesquels elle avait grandi, depuis peu elle trouvait flatteur qu'un homme ait pour elle des égards... Il avait eu la délicatesse de ne pas s'imposer, ce à quoi elle fut également sensible : Agatha détestait qu'on puisse la voir en position de faiblesse. Elle se hâta de dissimuler ses pleurs, rassembla ses esprits et se retourna. C'était un jeune homme au physique agréable, qu'elle n'avait effectivement encore jamais encore rencontré - et pourtant, à force d'y être maintenue en permanence enfermée, elle connaissait pratiquement tous les habitants de la Forteresse, jusqu'aux plus humbles des domestiques...

Pour se donner une contenance, elle resta appuyée contre la cheminée. La jeune fille n'était pas très à l'aise avec les inconnus. De par son enfance particulière, elle se révélait un peu sauvage, naturellement méfiante. On lui avait appris l'art des armes, mais très peu celui de se comporter en société.

- Le bonjour, sir. Pardonnez ma distraction, dit-elle d'une voix hésitante en l'examinant sans en avoir l'air. J'étais plongée dans mes pensées, j'espère que je ne vous ai pas froissé.

Un silence un peu gêné s'ensuivit, et elle dut faire un effort sur elle-même pour prolonger la conversation. Le silence était plus embarrassant encore, du reste. Elle prit exemple sur ce qu'elle avait pu observer du comportement des habitants de la Forteresse en pareille circonstance. Le rouge lui montait aux joues, était-ce seulement à cause de la chaleur du foyer de la cheminée ?

- Il ne me semble pas vous avoir jamais rencontré auparavant, lança-t-elle distraitement en promenant sa main sur la garde de son épée. Débarrassons-nous des formalités d'usage : je me nomme Agatha Sereg, fille de Tyler. Ne m'en veuillez pas, mais je n'ai guère l'habitude des mondanités... Et vous ? Vous venez d'arriver ici, semble-t-il ?

Agatha se découvrait plus féminine qu'elle ne l'aurait cru. Quelque chose qu'elle n'avait jusqu'alors jamais ressenti la troublait, ce qui achevait de la mettre très mal à l'aise. Elle voulait éviter de le regarder, et pourtant ses yeux se relevaient de temps à autre subrepticement sur lui. A première vue, il ne s'agissait pas d'un soldat venu s'engager parmi les troupes humaines ; trop frêle pour cela... S'il venait de l'extérieur, peut-être lui apprendrait-il des choses qu'elle ignorait ? C'est cela. Elle allait le mettre en confiance et le faire parler. Un nouveau venu ignorerait sans doute tous les mystères qu'on s'ingéniait à entretenir à chaque fois qu'elle posait une question sur le dehors...

[Je suis heureux madame de vous tenir compagnie , vous aviez l'air si seule.]

La réaction de la jeune femme ne surprit pas le délicat Owen. En aucun cas il aurait aimé lui parler des tourments de l'inconnue au beau milieu de la conversation telle une banalité. Owen avait aussi le sens de la courtoisie et des bonnes mœurs malgré sa forte timidité et sa gêne presque maladive envers les femmes. Lui même le savait, les femmes lui font peur et sont plus redoutables que des hommes armés de bons glaives bien tranchants. Il rangea toutes ses pensées de timidité dans un coin bien caché de son esprit et écouta la jeune femme lui dire bonjour. Naturellement sa tête fit une nouvelle fois une révérence vers l'inconnue qui se demandait si le jeune homme n'avait pas été froissé. Pourquoi le serait-il ? Owen émit un léger sourire et montra sa négation avec un léger mouvement de tête tandis qu'un silence presque gênant s'était installé dans la pièce.

Lui s'occupa de regarder autour de la jeune femme la beauté de la pièce et comment il était bon de se réchauffer au coin d'un bon feu de cheminée. Il se remémorait de bons souvenirs dans sa nouvelle chambre où le jeune homme se prélassait après un bon bain devant les flemmes brulantes qui se hâtaient de monter vers la bouche d'aération. Il adorait regarder le feu, c'est une bonne manière d'oublier ses problèmes et de gouter à la sérénité. La jeune femme brisa ce silence et sa tête revint doucement vers elle pour écouter attentivement ce qu'elle lui disait. Sa jambe était croisée sur l'autre et ses mains soigneusement posées sur ses cuisses. On aurait pensé à un roi bienveillant qui écoutait les conseils de ses ministres en proie à dire de belles paroles. A son tour, il répondit :

"Je me nomme Owen Sol..Solomon. Et vous avez raison, cela ne fait pas longtemps que je vis ici. L'extérieur était trop étouffant pour moi. Oxymore assez intéressant. L'extérieur était pour lui ce manoir étouffant dont il ne pouvait pas sortir. D'une forteresse à une autre, on se demande si la prison où il est en ce moment est peut être moins insupportable que l'autre étant donné qu'il y a plus d'âmes qui vivent.
Je suis sur que d'après vos dires, vous devez connaitre presque toutes les personnes qui vivent dans cette forteresse ?"

Il ripa à son nom, cette fâcheuse habitude ne se perdra jamais. Il eut cette hésitation de peur à ce que des membres de cette Organisation le reconnaisse sous son nom véritable. Et puis...flûte se disait-il, pourquoi continuer éternellement à se cacher ? En fin de comptes, Agatha ne devait même pas être au courant si elle vit depuis le début dans la Forteresse. Quant à lui, son nom ne lui disait pas grand chose mais il espérait changer cela en bavardant avec cette dame si elle le désirait. Vu la façon dont elle le regarde, il jurerai que c'est le cas. Il remarqua son épée rangée dans son fourreau. Owen se sentait bien "nu" devant elle qui portait uniquement sa petite dague à sa ceinture. Forte heureusement pour lui, son valet Will s'occupait souvent de la dague de son maître...Il devait être armé si simple soit-il quelque soit où il allait. Qui sait ce qui pourrait arriver. Il n'y a pas que les vampires ou les lycans qui peuvent se montrer dangereux.

Owen repoussa une mèche de ses cheveux châtains vers son oreille gauche. Contrairement à de nombreux hommes dans cette forteresse qui maniaient admirablement l'épée sans penser à leur hygiène, Owen avait de magnifique cheveux fins et doux. Il n'avait aucun remède particulier à cette beauté soyeuse mise à part sa haine aiguë pour le combat...Préférant se retrancher dans les livres, la littérature, la musique et ses recherches, Owen ne devait pas transpirer énormément sauf dans son intimité et les rares fois où il veut s'occuper de son corps pour ne pas devenir frêle tel un arbuste. Owen passa ses doigts fins sur sa bouche. C'était un mimique qui montrait sa timidité. Il se creusait les méninges pour savoir comment ne pas faire fuir la demoiselle qui n'allait pas se lasser de le regarder réfléchir éternellement.

"J'avoue Milady que votre épée m'interpelle. Êtes vous soldat de ce donjon ?"

Si la réponse était affirmative, il serait alors très impressionné par le fait qu'une femme soit soldat. Pardonnez son ignorance mais on a habitué Owen à bien faire la différence entre les sexes. Les femmes devaient s'occuper de leur mari las des combats et des intrigues politiques ou qui s'est tué au travail. Lui n'aimait guère cela et préférait s'intéresser à des choses différentes. Cela pouvait se comprendre vu la taille de sa dague et son inexpérience au combat. Il accusait une certaine douceur dans ses paroles qui nous ferait oublier sa gêne perpétuelle. Son maintien et sa prestance sur le canapé le rendait si charismatique et mystérieux à la fois.

*Timide, tremblant à l'idée de devoir parler... , pensait-elle avec un sourire légèrement ironique. Plus au fait que moi des convenances, mais plus effrayé aussi à l'idée d'engager une conversation avec des inconnus... Voilà qui me change des Templiers, assurément. Et cette minuscule dague, à quoi pourrait-elle servir sinon à se curer les ongles ? Pas grand chose à craindre de ce nouvel arrivant.*

- Solomon ? , dit-elle en se dirigeant vers la fenêtre pour regarder ce qui pouvait se passer dans la cour. Ce nom ne m'est pas totalement inconnu, mais je ne saurais dire où je l'ai entendu. Avez-vous quelque parent parmi les Templiers ?

Elle se retourna, revint vers lui et s'assit tout près, sur le dossier d'un fauteuil. Maintenant qu'elle commençait à le cerner un petit peu mieux, elle trouvait sa compagnie amusante. Il lui semblait totalement inoffensif, elle était presque certaine qu'il se serait évanoui si elle avait tiré l'épée devant lui. Une chose l'intriguait malgré tout : quelle fonction un tel homme pouvait-il venir remplir ?

- J'ai passé ici toute mon enfance, Sir Owen, répondit-elle d'un ton détaché. Etant placée sous la protection directe de lady Sarah et des maîtres templiers, je puis dire sans me vanter que je connais à peu près tout le monde ici. Et, sans vous offenser, vous avez toutes les manières d'un nouveau venu. Vous apprendrez bien vite qu'il faut se montrer plus sûr de soi en ces lieux si on ne veut pas rester dans l'ombre. D'ailleurs, pour quoi vous a-t-on recruté au juste ? Etes-vous seuelement venu trouver refuge parmi nous ?

Elle passa la main sur sa cuisse, où elle avait pris un coup assez douloureux lors de l'entraînement de la veille. Elle avait demandé au soldat de la traiter comme n'importe quel autre guerrier et le moins qu'on puisse dire est qu'il l'avait prise au mot. Elle en gardait un beau bleu.

- L'extérieur vous était étouffant ? , reprit-elle en riant. Je ne sais pas si vous avez choisi le bon endroit pour ne point étouffer, sans vouloir vous décourager... Il est des jours où l'on étouffe ici comme dans une prison ! Si vous êtes casanier, vous y trouverez votre compte ; mais si vous recherchez l'aventure, vous risquez d'être déçu... Quoi que... Ces temps-ci, des événements font que les choses semblent vouloir enfin bouger. Il faudra, si vous le voulez bien, que vous me parliez de ce monde extérieur que vous avez eu la chance de connaître. Pour ma part, je ne connais guère que cette enceinte, dans ses moindres recoins...

Elle avait remarqué qu'il regardait avec insistance son épée ; une arme de combat contrairement à la dague d'opérette qu'il avait à la ceinture. Cela l'amusait, et serait peut-être un moyen d'obtenir de lui quelques confidences ; et peut-être même de le persuader de l'emmener au dehors.

- Effectivement, dit-elle en se redressant et en sortant l'arme de son fourreau, caressant la lame.Je suis soldat du Temple, fille de Templier ; toute ma vie jusqu'à présent a été consacrée à l'apprentissage de l'art du maniement des armes. Cela peut vous surprendre pour une jeune fille, mais ne vous fiez pas aux apparences : ma lame est aussi redoutable que celle du plus averti des guerriers de cette Forteresse... Vous a-t-on également enseigné la pratique de l'épée ? Vous semblez issu d'une bonne famille, on a bien dû vous y initier, non ?

Elle lui tendit l'épée, histoire de voir comment il s'en sortirait avec cette lourde arme de combat dans les mains, même s'il demeurait assis. Pour Agatha, la valeur d'un homme se mesurait à sa capacité à manier les armes, tout le reste était futilités d'oisifs issus de l'ancienne noblesse de cour... Elle se sentait en confiance, peut-être trop, certaine qu'elle était d'avoir le dessus s'il tentait quoi que ce soit... Il n'était pas sans charme, mais semblait en tout si... inoffensif. Un peu comme certaines nouvelles recrues que les soldats et elle chahutaient à leur arrivée. La jeune fille n'avait plus qu'une idée : profiter de cette rencontre pour sortir de l'enceinte de la Forteresse... Il ne pourrait refuser, il n'oserait probablement pas.

- Mais que diriez-vous d'aller prendre un verre ensemble, histoire de faire plus ample connaissance, Sir Owen ? Vous pourriez ainsi me parler de vous, et du dehors, celui qui vous étouffe...

[Hrp : une chose à dire = ce n'est pas la longueur qui compte ! vila]

Owen avait appris comment réagir si une personne pensait reconnaitre son nom. Il faisait comme s'il était un homonyme peu connu malgré la prestance de ses vêtements et de ses manières. Et enfin vint le sujet des templiers. Owen ne connaissait presque pas cette organisation pour le moins obscure. Maître Garland lui même n'avait pas osé apprendre au jeune homme les histoires rocambolesques - ou réelles - des templiers à travers le temps. Vu comment il adule toutes les nouvelles choses qu'on lui enseigne sans pour autant les toucher de lui même, Owen aurait dévoré tous les ouvrages s'y rapportant. Il écoutait les dires de son interlocutrice avec attention et ne désira pas s'attarder plus longtemps sur l'origine de son nom. Elle s'assit près de lui tout en appuyant sur un endroit de sa cuisse qui semblait lui donner des douleurs. Owen ne le remarqua pas et s'offusqua très légèrement de sa présence à ses cotés. Il eut à peine un petit sursaut, reprit doucement sa respiration comme pour se rassurer et continua à scruter ses lèvres en train d'enchainer les paroles.

"Ce sera avec plaisir Milady..." dit-il avec un sourire plutôt timide et gêné.

La question sur l'épée de la Lady était pour le moins offensante si on était féru des bonnes manières. Owen voulait s'excuser mais Agatha continua son récit sur ses origines et ses prouesses au combat. Certes elle a du suivre un entrainement rigoureux tout comme Owen avec Maître Darland ; mais cela ne pouvait pas changer le fait qu'un homme bâti comme une montagne est plus 'puissant'. Vu comment est le monde aujourd'hui, un homme fort mais lent est-il plus meurtrier qu'une femme agile et rapide ? Owen avait presque honte de voir qu'une demoiselle si belle et si jeune puisse le surpasser au combat...Contrairement aux autres hommes, il n'était pas machiste. Il reste toujours bouche bée devant le fait qu'une femme puisse manier l'épée et lui d'une minuscule dague d'appoint. Elle lui donna celle-ci sans difficulté et le jeune homme en fut surpris. Owen serra la poignée du mieux qu'il pu pour ne pas la faire tomber sur sa compagnie ou ailleurs. Il se leva difficilement avec et se mit à distance respectable d'Agatha.

"Je n'en doute pas Milady" dit-il avant de se lever."Magnifique. Peut être que je manque d'exercice selon vous ?" Il pointa l'épée vers la porte afin de regarder si l'épée était droite comme un i. Owen la fit tourner telle une brindille toute légère. Avec le poids, l'épée revient d'elle même vers la position où elle a été lancé. Tout est question de maintien et de précision pour ne pas la recevoir derrière la tête.

"Je ne suis peut être pas un homme d'arme mais c'est une bonne épée. Les leçons que mon père voulait me donner étaient trop dangereuses selon ma mère. Il ne contrôle pas sa force ni sa colère...J'ai préféré me retrancher vers un savoir beaucoup moins...dangereux si j'ose dire, sans vous offenser bien sur. Tenez très chère."

Son seul souhait était qu'Agatha n'éclate pas dans une hilarité folle en voyant son petit tour de girouette avec sa propre épée. Il se rassit près d'elle à une distance convenable. Elle lui demanda s'il voulait venir boire un verre avec la demoiselle en parlant de lui, de ses origines et de l'extérieur. Pour les premiers points, Owen manqua de faire la moue tel un enfant ennuyé. Il n'était pas quelqu'un à fantasmer de parler de lui même bien au contraire. C'est sans la raison pour laquelle on le sent beaucoup trop effacé lors des mondanités ou dans une simple conversation. Il fit un petit mouvement de la tête sur le coté avec ce petit sourire carnassier lorsqu'on est intimidé par une question gênante. Owen avait un sourire agréable à regarder surtout quand on voit l'état irréprochable de ses dents. Il prenait soin de lui à tous les niveaux. Les dentifrices de l'époque n'assuraient sans doute pas la blancheur éternelle des dents mais ils pouvaient, selon certains, faire tenir plus longtemps celles-ci avant de devenir des caries impitoyables. Owen cessa de sourire et reprit la parole avec sérieux.

"Vous pensez que je connais l'extérieur tel un pèlerin qui voyagent vers des lieux inconnus ou reculés ? Je ne suis pas ce genre d'individu. Néanmoins, je pourrais vous parler du peu que j'ai vu en buvant avec vous. Si vous le désirez, nous pourrions y aller avant le souper ?"

A force de parler - et Owen n'était pas un orateur très expressif à vrai dire -, il avait soif. Autant le faire avec quelqu'un à ses cotés qui était fasciné par le peu de choses qu'il avait pu voir à l'extérieur. Il croisa les jambes dignement, plaça ses mains sur les cotés du canapé pour se remettre dans une position confortable en attendant sa réponse.

[HJ : il n'empêche que je me gausse volontiers de votre petite dague, très cher ]

Le jeune homme éludait les questions, ou restait évasif, ce qui faisait se dire à Agatha qu'il avait sans doute des choses à cacher. Du reste, qui ici pouvait prétendre ne pas avoir sa part de secret ? Après tout, cela lui importait peu. ; son but était ailleurs que d'en apprendre plus sur cet inconnu, car tôt ou tard, elle aurait des réponses à ce genre de questions... Elle eut un sourire amusé quand il sursauta alors qu'elle s'asseyait plus près de lui. Décidément, il se montrait bien craintif ! Mais le pire fut encore quand il s'essaya à l'épée, parlant de sa mère voulant le protéger des exercices dangereux : elle ne voulut pas le vexer, et se retint de rire. Cela la changeait considérablement des guerriers qu'elle côtoyait habituellement.

- Vous êtes un homme... peu commun, sir Owen, si je peux me permettre, dit-elle en reprenant l'arme et en la glissant à nouveau dans son fourreau. Votre mère avait sans doute ses raisons de vouloir vous protéger... Mais il y a des choses bien plus dangereuses encore que les armes, j'espère pour vous que vous n'en ferez pas l'expérience de sitôt ici. Le savoir... Et quelle sorte de savoir ? Oh pardon, je suis à nouveau indiscrète, et je suppose qu'une fois encore vous ne répondrez pas !

Elle n'avait pu s'empêcher d'envoyer cette remarque, accompagnée d'un rire certes moqueur et un brin offensant ; de quoi titiller un peu son orgueil masculin... Il demeurait toujours aussi crispé et distant, ce qui ne laissait de la surprendre, mais aussi déjà de la lasser. Elle avait vu arriver ici de drôles d'oiseaux, mais de cet acabit, jamais. Une chose était désormais certaine : elle ne lui servirait pas de garde du corps pour s'aventurer ensemble à l'extérieur, elle imaginait autrement son escapade hors de ces murs. Elle en rit de plus belle, ne parvenant plus à se maîtriser ; tant pis s'il le prenait mal et du coup trouvait une excuse pour filer. Elle se trouva du coup embarrassée lorsqu'il accepta sa proposition de sortir prendre un verre, ne souhaitant nullement substituer à l'ennui de ces lieux une soirée toute aussi ennuyeuse en compagnie cet inconnu timoré aux vagues allures de bougre.

- Désolée, dit-elle en optant pour la manière rude. L'envie m'est passée. Peut-être une autre fois ? En tout cas, vous m'avez distraite, sir Owen, même si ce fut, et vous m'en excuserez, à vos dépens...

Elle se leva, enthousiaste, jeta un regard vers la fenêtre pour observer le poste de garde. La relève aurait lieu dans peu de temps, ce serait le moment idéal dont profiter pour faire une sortie discrète. Elle sortirait seule, par une vieille poterne qu'elle avait découverte quelques jours plus tôt et qui échappait à la vigilance des gardes au moment de la relève. Elle vint se camper devant lui, s'inclinant de la façon la plus aimable possible avant de se retirer.

- Le bonsoir, sir Owen, et sans doute à une fois prochaine.

Elle quitta aussitôt la pièce, il était temps de filer avant qu'il ne puisse objecter quoi que ce soit qui la fasse revenir sur sa décision. Au passage, elle le frôla négligemment du fourreau de son épée.

[C'est ensuite qu'Agatha se retrouve dans les ruelles de Londres face à Rémus.]