Appartements de monseigneur Bradwardine :
Monseigneur Bradwardine, lorsqu'il séjourne à la Forteresse, dispose de petits appartements composés d'une chambre assortie d'un petit salon et d'une garde-robe faisant également office de salle de bain. Pur caprice, car il séjourne en divers endroits et passe sans cesse de l'un à l'autre... Il a voulu y recréer l'atmosphère luxueuse et distinguée de ses résidences privées, sans y mettre ses meubles les plus précieux.
L'entrée se fait à l'est par le petit salon, de dimensions moyennes, avec une large fenêtre donnant sur la cour principale à tenture de velours castor fumé brodé de soie blanche et or ; les murs sont garnis de boiseries rococo peintes en blanc et or, avec des angelots qui, si on regarde bien en détail, se livrent à des jeux étranges... Une cheminée de marbre blanc très sobre se trouve à droite de la porte d'entrée.
De là, on gagne la chambre, qui n'a pas d'accès direct sur les parties communes ; c'est une vaste pièce aux murs tendus de soie violette brodée aux armoiries de l'archevêque ; placée dans l'angle de l'étage, elle ouvre par deux larges fenêtres sur le parc et une autre, avec un petit balcon orné de ferronneries, du côté de la cour principale. Une grande cheminée de marbre turquin en constitue l'un des plus précieux ornements. Quant aux fenêtres, elles sont garnies de lourdes tentures de soie dorée rehaussée de motifs végétaux et de chinoiseries.
Enfin, une porte dérobée donne accès depuis la chambre à la garde-robe, ouvrant par une petite fenêtre sur l'arrière du bâtiment. C'est une petite pièce qui dispose d'une petite cheminée d'angle (l'archevêque est très frileux).
L'ensemble est haut sous plafond, avec des plafonds plâtrés ornés de stucs baroques, et lumineux aussi bien le jour, grâce aux fenêtres, que la nuit, grâce aux lustres et chandeliers. Le sol, dans les trois pièces, se compose d'un parquet de chêne.
Mobilier :
Le petit salon est meublé en style anglais en bois d'acajou, avec de larges fauteuils devant la cheminée, et quelques chaises placées le long des murs, le tout assorti aux tentures de la fenêtre. Un pan de mur entier est occupé par une bibliothèque. On trouve également une commode ornée de bronzes à l'antique, une petite table de jeu et un large bureau ministre avec son fauteuil garni de cuir. Sur le bureau trône un étrange petit crucifix d'or serti de pierres précieuses. C'est là que l'archevêque reçoit ceux qui ne font pas parti de ses intimes.
Le mobilier de la chambre est plus hétéroclite. Le grand lit à baldaquin en acajou sculpté est garni d'étoffe précieuse brodée et passementée d'or, avec au-dessus de la tête de lit deux anges tenant les armoiries de l'archevêque ; le chevet assorti est placé à droite et la nuit un lit est déplié au pied pour le valet, remisé le jour dans la garde-robe. Quelques meubles ramenés d'Italie : une armoire peinte de motifs mythologiques, deux consoles de bois doré à pattes de lion et deux lourds fauteuils assortis, tendus de soie parme, placés devant la cheminée. Une commode française offerte par un cardinal de ce pays, ainsi que quelques petites tables marquetées disséminées dans la pièce. Au-dessus de la cheminée se dresse un large tableau représentant Marie-Madeleine en pénitente, et entre les deux fenêtres côté parc un grand crucifix espagnol proprement effrayant de réalisme...
La garde-robe, enfin, dispose de deux grands coffres servant à ranger les effets du prélat, mais surtout d'une grande baignoire de marbre de Carrare imitée des sarcophages romains, et de tout le nécessaire de toilette rangé dans une malle de cuir rouge spécialement conçue pour lui.
Dans tout l'appartement se trouvent des oeuvres d'art, antiques ou contemporaines, et les sols sont largement garnis de précieux tapis d'Orient qui donnent confort et chaleur.